@klonaris-thomadaki
Née au Caire, de parents grecs et médecins, ayant grandi à Alexandrie, puis à Athènes, Maria Klonaris fit d’abord des études en anglais à l’université, et de scénographie à l'école des beaux-arts d’Athènes, avant de partir à Paris, où elle suivi, à la fois, un
enseignement d’Egyptologie à l’EPHE, de cinéma expérimental et
esthétique à Paris 1, et ultérieurement d’infographie à l’ENSAD.
Mais sa vie,
dès avant leur installation à Paris en 1975, rejoint celle de Katerina
Thomadaki. A Athènes, elles
dirigent le Théâtre des 4 puis
l’espace de recherche théâtrale. A Paris, c’est le cinéma expérimental dans
lequel elles s’engagent à deux fondant leur pratique dans un prolongement
de leur vie ensemble–et réciproquement. Klonaris/Thomadaki, avec
une barre entre les deux noms, c’est aussi comme un trait d’union. Un trait d’union, qui relie la projection filmique à son dispositif élargi à l’installation, et à une problématique corporelle, nourrie des abstractions de la pensée critique, en rupture avec un cinéma narratif
dominant de la distance voyeuriste .
Celui de Klonaris/Thomadaki porte au contraire, dans son extension même à la peau, la revendication d’une « féminité radicale » : un questionnement de la frontière, symbolisée par la différence
sexuelle : entre les genres, entre les disciplines, entre l’art et la vie, entre les gens. Et d’abord, « entre-nous », dans la plasticité d'une production qui, sans cesse «filme les identités sexuelles comme une complexité en mouvement », remet
en cause la singularité d’un auteur, rend sa liberté à la
circulation entre l’intérieur et l’extérieur et
s’ancre dans une généalogie où on trouve aussi bien Claude Cahun/Marcel
Moore, que les pratiques queer de Pauline Boudry/Renate Lorenz…
Dans
leurs œuvres plastiques et leurs livres, elles forgent ainsi le
concept de "corps dissidents" dont les motifs sont d'abord l’hermaphrodite,
l’ange, les jumeaux, l’« inquiétante étrangeté », le « monstre ». C’est à la
disposition des récits et les
images mythiques (en particulier ceux de la Grèce ancienne) que Klonaris/ Thomadaki mettent les technologies dont
elle font usage. De nombreux essais critiques s'en font l'écho, par Marie José Mondzain, par Marina Gržinić, ou par Nicole Brenez, qui célèbre la capacité des cinéastes à (nous) plonger « dans un monde envoûtant, aux
limites de l’hypnose ou de
la transe »
Les œuvres de Klonaris/Thomadaki ont été présentées dans de nombreuses institutions, tels que le Centre Pompidou,
le musée d’Art moderne de la Ville de Paris et la Cinémathèque française (Paris), le MoMA (New York), la National
Gallery of Art (Washington), le British Film Institute et la Tate modern
(Londres), la Fondation Joan Miro (Barcelone), la Kunsthalle Wien, la Pinacothèque d’Athènes... Trois de leurs films les plus importants ont été restaurés par les
Archives françaises du film
du CNC avec la BnF et le 16 novembre 2012, la BnF consacrait une manifestation à Maria Klonaris et Katerina Thomadaki, rendant
visibles leur fonds d’archives.
En décembre 2012, le centre audiovisuel Simone de
Beauvoir programmait deux
films de la série
Portraits, l’un par
Katerina Thomadaki, l’autre par
Maria Klonaris.. Maria Klonaris était venue au cinéma Latina et c'est là que nombre d'entre nous l'avaient rencontrée pour la dernière fois.
Le 13 janvier dernier, elle s'est endormie et ne s'est pas réveillée.
Katerina Thomadaki fait part qu'une messe orthodoxe sera célébrée le 21 janvier 2014 à 14h30 en l’église Saint-Julien-le-Pauvre, 79 rue Galande, Paris 5e.Le rituel sera suivi d'un recueillement à 16h00 en la salle Mauméjean du crématorium du cimetière du Père-Lachaise. Un hommage sera rendu à Maria à l'église et au crématorium.